La cession d’entreprise est une opération stratégique complexe engageant des enjeux financiers, juridiques et fiscaux majeurs. Pour sécuriser la transmission, acquéreur et cédant doivent maîtriser plusieurs notions incontournables. Voici les points clés à connaître avant d’entamer un processus de cession.
1. La lettre d’intention (LOI) : le cadre des négociations
La lettre d’intention — ou LOI (Letter of Intent) — constitue la première étape structurée d’une négociation de cession. Elle permet au cédant de s’assurer du sérieux de l’acquéreur potentiel et de préserver la confidentialitédes échanges, conformément au principe de liberté contractuelle (art. 1102 et 1103 du Code civil).
Généralement, la LOI :
- définit le périmètre de la transaction (titres, actifs) ;
- fixe les modalités de détermination du prix et parfois une fourchette indicative ;
- encadre le calendrier des discussions ;
- organise les règles de confidentialité, d’exclusivité et de rupture ;
- précise les conditions suspensives envisageables (audit, financement, autorisations).
Son caractère engageant ou non-engageant dépend strictement de son contenu et non de son intitulé. Une rédaction rigoureuse est indispensable : la LOI devient en pratique la “loi des parties” jusqu’à la signature du protocole d’accord.
2. L’audit d’acquisition : une étape incontournable
L’audit d’acquisition (due diligence) est déterminant pour l’acquéreur. Il lui permet de vérifier la sincérité des informations fournies, d’évaluer les risques potentiels et de finaliser son analyse de valorisation.
Il couvre généralement plusieurs domaines clés :
- Comptable et financier : analyse bilancielle, trésorerie, prévisions.
- Fiscal : conformité déclarative, risques de redressements (art. L. 169 LPF).
- Social : contrats de travail, conformité du droit du travail, risques prud’homaux.
- Juridique : gouvernance, contrats, propriété intellectuelle, litiges.
- Environnemental (si applicable) : conformité ICPE (Installation Classée pour la Protection de l’Environnement), pollution éventuelle.
Réaliser cet audit via des experts spécialisés permet à l’acquéreur de prendre une décision éclairée et d’affiner les termes du protocole.
3. Le protocole d’accord : l’acte central de la cession
Le protocole d’accord — ou SPA (Share Purchase Agreement) — constitue l’acte contractuel principal qui formalise les engagements des parties. Il précise notamment :
- le prix de cession et les modalités de calcul ;
- les modalités de paiement (comptant, crédit-vendeur, earn-out) ;
- les conditions suspensives (audit satisfaisant, obtention de financement, agrément) ;
- la date de transfert de propriété et de jouissance.
Tant que les conditions ne sont pas levées, l’opération n’est pas définitive (art. 1304 Code civil). Lorsque toutes les conditions sont satisfaites, le protocole devient définitif et le transfert de propriété peut intervenir.
La sécurité juridique est le premier moteur d’une cession d’entreprise réussie.
4. La garantie d’actif et de passif (GAP) : protéger l’acquéreur
La garantie d’actif et de passif est un mécanisme essentiel. Le vendeur s’engage à indemniser l’acquéreur si un passif non déclaré apparaît ou si un actif est surestimé pour une cause antérieure à la cession.
Elle couvre notamment :
- dettes fiscales non révélées ;
- litiges en cours ou futurs liés à des faits antérieurs ;
- engagements contractuels non déclarés ;
- diminution d’actifs significatifs.
La garantie constitue pour l’acquéreur une protection post-cession, souvent assortie d’un plafond, d’une franchise, d’une durée limitée et éventuellement d’une garantie de la garantie (séquestre, caution bancaire).
5. Les points sensibles de la négociation
Un autre avantage du gestionnaire de patrimoine est sa capacité à orchestrer l’ensemble des expertises nécessaires :
- avocats fiscalistes,
- notaires,
- experts-comptables,
- voire banquiers privés.
Il agit comme un chef d’orchestre qui coordonne les décisions et s’assure de leur cohérence. Cela évite les choix isolés, parfois contradictoires, qui pourraient fragiliser la stratégie patrimoniale globale.
6. Les clauses statutaires à respecter avant la cession
Lorsque le cédant n’est pas associé ou actionnaire unique, il doit vérifier la conformité de la cession aux clauses statutaires ou aux pactes d’associés :
- clause d’agrément (art. L. 223-14 et L. 228-23 du Code de commerce) ;
- clause de préemption ;
- clause d’inaliénabilité (limitée à 10 ans).
Le dirigeant devra convoquer une assemblée générale afin de faire statuer les associés sur ces restrictions éventuelles.
7. Les droits d’enregistrement
L’acte de cession doit être enregistré dans le mois auprès de l’administration fiscale (art. 635 CGI).
Les droits applicables portent sur les :
- Parts sociales
- Actions
En pratique, les droits sont acquittés par l’acquéreur, sauf convention contraire.
Une préparation juridique claire transforme la cession en véritable opportunité.
